Immigration : les chiffres qui démontent les clichés

La récente votation suisse qui s’est traduite par un “non” à l’immigration et la popularité de Maggie de Block, la secrétaire d’Etat belge à l’Immigration, démontrent à quel point l’immigration est un sujet brûlant dans nos sociétés occidentales. Lors d’une conférence qu’il a donnée à la Société royale d’économie politique de Belgique, Frédéric Docquier, chercheur au FNRS et professeur d’économie à l’UCL, a cassé certains mythes.


La pression migratoire est forte et s’est accrue depuis les années 60. Au niveau mondial, le nombre de migrants est passé de 92 millions en1960 à 211 millions en2010. Toutefois, la proportion des migrants par rapport à la taille de la population mondiale reste stable (environ 3 %).

Pressions et exagérations

On constate que, souvent, le sujet des migrations véhicule de fausses assertions qui ne sont pas validées par la réalité économique. “Traditionnellement, en Europe, on considère l’immigration comme un problème. L’idée que l’on reçoit de nombreux immigrants peu qualifiés est largement répandue. De même, les personnes sondées lors d’enquêtes d’opinion estiment que l’immigration a un effet négatif sur l’emploi et sur les salaires. L’idée que l’immigration a un impact négatif sur la criminalité et sur le déficit budgétaire est aussi ancrée dans les mentalités. Il en résulte des pressions pour réguler l’immigration, la décourager ou encore pour sélectionner les migrants à l’entrée” , note Frédéric Docquier. On estime qu’environ 50 % des Américains du Nord et des Européens pensent que l’immigration est un problème et a des effets économiques négatifs. Quand on leur pose la question sur la proportion de l’immigration dans leur pays, les Américains estiment que 35 % de la population américaine est étrangère alors que la part des migrants dans ce pays n’est que de 14 %. Les Européens pensent, quant à eux, que cette proportion est de 24 % alors qu’elle n’est que de 10 %. “Il est donc manifeste que la perception de l’immigration est négative et qu’il y a une méconnaissance et une exagération des chiffres, d’où l’intérêt d’analyser les effets économiques de la migration et sa contribution nette dans certains facteurs économiques” , souligne Frédéric Docquier.

Une meilleure productivité

Quand on analyse l’effet fiscal de l’immigration, on constate que tous les groupes migrants ne contribuent pas positivement mais que la moyenne générale des migrants apporte un effet fiscal positif. Quand on se penche sur le coût de l’immigration sur le budget, il faut tenir compte du vieillissement de la population migrante et veiller au renouvellement du stock migratoire. “Le coût fiscal de l’immigration pour les natifs d’un pays n’est pas confirmé. En général, on constate que les migrants ont un niveau d’éducation qualifié, c’est-à-dire au moins un diplôme de l’enseignement secondaire supérieur. Par ailleurs, les effets sur l’emploi et sur le niveau des salaires des natifs sont faibles voire même plutôt positifs” , ajoute Frédéric Docquier. L’immigration augmente aussi la taille d’un marché : il y a plus de consommateurs. Elle favorise l’entrepreneuriat, la diversité et la productivité totale des facteurs économiques. “En moyenne, les coûts économiques de l’immigration sont non confirmés. L’immigration non restrictive pourrait devenir coûteuse mais il n’y a aucune raison économique de réduire les migrations. Par contre, l’émigration, le fait que des talents quittent un pays, est un vrai problème économique” , constate Frédéric Docquier. A la question de savoir si le monde politique interroge ce professeur sur ces recherches qu’il mène depuis une quinzaine d’années, la réponse est claire : “Non, nous ne sommes pas interrogés par le monde politique sur ce sujet !” On ne pourra que déplorer, une fois de plus, le manque de communication entre les experts académiques et le monde politique sur un sujet d’actualité aussi brûlant.

© La Libre Belgique

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